CECI n'est pas EXECUTE Régionalisme et cosmopolitisme : l’Inde du Sud

Les ateliers du quinquennal 2014-2018 |

Régionalisme et cosmopolitisme : l’Inde du Sud

Régionalisme et cosmopolitisme : l’Inde du Sud

Coordination : Emmanuel Francis

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L’Inde du Sud – constituée des quatre états actuels de l’union indienne que sont le Karnataka, l’Andhra Pradesh, le Kerala et le Tamil Nadu – se singularise à plusieurs égards en Asie du Sud. C’est là, par exemple, que sont parlées les principales langues du groupe linguistique dravidien tandis qu’au nord de l’Inde dominent les langues indoeuropéennes. Le système de parenté est isogame. L’architecture religieuse est caractérisée par des pavillons d’entrée élevés et multicolores. La « science » coloniale a contribué à mettre en avant ce qui distingue l’Inde du Nord de l’Inde du Sud, une construction reprise par les mouvements nationalistes.

Cependant, dès une période ancienne, l’Inde du Sud s’est inscrite dans un cadre géographique et culturel plus vaste et englobant. Le sanskrit, langue indo-européenne devenue la langue panindienne de culture et du discours politique, y est attesté et pratiqué depuis les débuts de notre ère. Les courants religieux et philosophiques issus du brahmanisme y ont pris pied dès la même époque, tandis que le bouddhisme et le Jainisme y trouvaient une terre d’accueil.

L’Inde du sud, comme d’autres régions de l’Asie du Sud-Est, s’est ainsi trouvée soumise à un processus qu’on appellera, faute de mieux, « indianisation », tout en adaptant, en transformant les apports extérieurs en un processus d’« indigénisation » ou de « localisation ». L’Inde du Sud fut elle-même la source de l’indianisation de certaines régions de l’Asie du Sud-Est à certaines époques, comme en témoigne le fait que les écritures d’Asie du Sud-Est dérivent d’une écriture sud-indienne, elle-même adaptation d’une écriture nord-indienne.

Avec la domination politique de l’Islam en Inde du Nord, l’Inde du Sud apparaît même comme un conservatoire de la culture hindoue et brahmanique, avec la subsistance de royaumes hindous. La culture hindoue et brahmanique ne disparut cependant pas en Inde du Nord et l’Inde du Sud connut aussi des régimes politiques islamiques.

À l’époque coloniale, la culture sud-indienne s’est aussi exportée, au gré des besoins en travailleurs et fonctionnaires des régimes coloniaux dans les autres parties de leurs empires. L’administration coloniale française envoya des fonctionnaires tamouls au Vietnam. Un nombre important d’ouvriers agricoles tamouls immigra au Sri Lanka. Plus récemment, les troubles politiques au Sri Lanka engagèrent de nombreux tamouls à émigrer. Il existe ainsi une diaspora tamoule de la Malaisie à la Réunion, de l’île Maurice à Paris.

L’équipe « Régionalisme et cosmopolitisme : l’Inde du Sud » fédère des spécialistes issus de différentes disciplines autour de ce fait régional sud-indien étudié sur la longue durée. Il s’agit de décrire les traits particuliers et les traits partagés d’une culture régionale, qui, tout au long de son histoire, s’est inscrite dans un double mouvement de cosmopolitisme et de régionalisme.

Nous visons une étude globale (culture, religion, société, littérature, politique, droit, représentations sociales et géographiques) grâce aux approches variées d’historiens, d’anthropologues, de géographes et de philologues dont les recherches portent sur l’Inde du Sud ou sur des cultures d’Inde du Sud en diaspora.

L’enquête se déploie sur le temps long de l’histoire afin d’appréhender la formation et la transformation de la culture sud-indienne en relation avec les autres complexes régionaux ou culturels avec lesquels elle entra en contact, de l’interaction avec la culture brahmanique et sanskrite de l’Inde du Nord dès le début du premier millénaire, avec la culture islamique peu avant le milieu du second millénaire, puis, à partir de la seconde moitié du second millénaire, avec les missionnaires chrétiens et les administrateurs coloniaux.

Nos questionnements, à partir d’études empiriques, sont notamment les suivants. Comment se définit-on en Inde du Sud par rapport à l’ensemble et au reste de l’Inde ? Dans quels milieux les influences « allogènes » ont-elles été reçues ? À quelles fins ? Quelles adaptations subirent ces apports extérieurs ? Quels domaines échappent aux influences extérieures ou dans quels domaines s’affirme une spécificité plus régionale ? Dans quelle mesure l’Inde du Sud peut-elle être considérée comme le conservatoire de la culture nord-indienne ? Quelle a été l’influence de la colonisation sur la formation de l’identité régionale moderne ? Comment se perpétue l’identité sud-indienne en diaspora ?

Ces études de cas seront accompagnées d’une réflexion théorique sur des notions et concepts tels que cosmopolitisme, régionalisme, cosmopolis sanskrite, sanskritisation, indianisation, aryanisation, brahmanisation, dravidien, anti-brahmanisme, acculturation, transculturation, syncrétisme, accommodation, localisation, vernacularisation, indigénisation, régionalisation, dé-sanskritisation, « colonial knowledge », etc.

Ces recherches seront menées dans une perspective globale et comparatiste. Il s’agit de décrire le fait régional sudindien et de le comparer à d’autres faits régionaux afin de raffiner notre description et notre compréhension, dans un dialogue avec les spécialistes d’autres régions de l’Asie du Sud, mais aussi d’autres aires culturelles.

Concrètement, nous couvrirons les domaines d’investigation suivants :

1) Religion :

récitation védique des brahmanes Nambudiri au Kerala (Michel Angot) ;

tradition des manuscrits et des commentaires du Tirumurukāṟṟuppaṭai, texte de la dévotion au dieu Murukaṉ (Emmanuel Francis) ;

accommodation du christianisme au temps des missionnaires, littérature « missionnaire » en tamoul (Ines G. Županov) ;

religion et identité territoriale tamoule en Inde et dans la diaspora, circulations professionnelles des prêtres de temples tamouls (de caste Ādiśaiva ou Śivācārya) en Inde et dans la diaspora (Pierre-Yves Trouillet).

2) Médecine traditionnelle :

rapports entre l’Āyurveda textuel et l’Āyurveda en pratique au Kerala (Michel Angot) ; transmission des connaissances et du savoir-faire dans la médecine Siddha (Brigitte Sébastia).


3) Alimentation :

agriculture et alimentation en Inde du Sud (Brigitte Sébastia).

4) Droit :

notion de droit coutumier tamoul, mode de production et analyse d’un corpus juridique vernaculaire du 18ème au 20ème siècle (Zoé Headley).


5) Islam :

implantation musulmane à l’époque prémoderne, reconstructions historiques et identitaires des musulmans d’Inde du Sud depuis le 16ème siècle (Johanna Blayac).


6) Arts de la scène et société:

rôle des courtisanes/artistes dans la société indienne, en particulier dans le cadre du temple et de la cour, changement de leur statut aux périodes coloniale et postcoloniale, à partir de l’analyse de sources et documents ethnographiques, épigraphiques et historiques (Tiziana Leucci).


7) Langue et littérature :

histoire culturelle et sociale de la langue tamoule (usages et représentations), éloges épigraphiques royaux en tamoul (Emmanuel Francis).


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Le carnet de recherche Régionalisme et cosmopolitisme


 

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